Bonjour Monsieur St Jacques 7

Publié le par de-st-jean-a-st-jacques.over-blog.com

Mercredi 21 juillet
Départ 8 h de Mélide.
Arrivée 12 h Arzua.
Brumeux et très frais au départ.
Un solide petit déj' au bar, face à l'albergue.
(Il y a souvent un bar en face des albergues !…)
Prends le chemin à l'envers, fais demi-tour 500 m plus loin, repasse devant le bar, où des pèlerins, voyant mon erreur, m'attendent en rigolant. Je ris autant qu'eux, sinon plus. Comme vous pouvez le constater, j'ai un sens inné de l'orientation !
Le chemin est toujours aussi beau et je suis sous le charme. Un arrêt, une mise en ordre de mon petit journal.
Au début, j'étais très attentive à ne laisser passer aucun jour sans écrire, mais maintenant, en "vieille routarde" que je suis devenue, je le laisse un peu de côté.

J'arrive à Arzua avec une petite faim d'olives vertes. Arrêt dans un bar, olives, bocadillo au caiso. La jeune serveuse me jette quasiment l'assiette devant moi ! On aime les pèrègrinos, ici ! Il faut dire qu'elle est débordée. Deux habitués au comptoir, avec lesquels elle plaisante et moi dans la salle !…
Je rencontre Danielle qui me cherche et en route pour la Via Lactéa.
Danielle m'a réservé un lit. Allongée près d'elle, je lui raconte mon chemin.
Arrive un gros baraqué qui hurle en me voyant ! C'est le taulier. Mon lit est au-dessus de Danielle, pas à côté. Il aboie, j'aboie plus fort et remets mon sac à dos, exige le remboursement et vais voir plus loin. Danielle est aux quatre cents coups. On se retrouvera à Santiago chez Dona Fina, vendredi.
Les albergues sont surpeuplées. Je trouve un hôtel super confort. L'hôtel Suiza, tout au bout de la ville et j'y retrouve devinez qui ? Oui… oui… oui… Yvan !
25 € la nuit, sans bruit, avec baignoire et petit déj'. Rien à dire…

 

Jeudi 22 juillet

Départ 7 h 15.
Arrivée 14 h 30, O Pedrouzo.
Petit pincement au cœur, c'est la dernière ligne droite.
En plus, je ne suis pas bien. Ou j'ai pris froid, dans la matinée, car il fait toujours très frais le matin, ou c'est les gambas d'hier soir qui ne passent pas. Bref, nausées, étourdissements, fatigue.
Je papote avec Yvan, puis repars.
Suis de plus en plus mal et y a pas grand chose à visiter. Chênes, eucalyptus, parfois de gros palmiers bordent le Camino.
Depuis midi, je cherche un lit. Complet, complet, complet.
J'ai le temps de penser !
Je fais donc le bilan de ces 38 jours de marche et ne trouve que du positif.
Même mes débuts, un peu difficiles où, quand j'arrivais, je m'écrasais sur mon lit, moulue de fatigue, me font sourire.
Et puis, mes petites habitudes :
mon sac refait à partir de 17 h, pour ne pas gêner les dormeurs le matin, avec le froissement des inévitables sacs plastiques.

Mes brosses à dents et à cheveux bien posées sur ma petite boîte à tout faire (fil à coudre, pince à épiler, ciseaux . . . )
Mes vêtements propres attachés à la barre du lit.
Le petit coup de lampe de poche sur et sous le lit, au petit matin, pour voir si je n'ai rien oublié.
Sincèrement, j'ai bien géré, comme disent mes enfants.
Et je ne parle pas de mes 7 kg laissés sur le chemin… 
Mieux que tous les régimes !…
Je ne me suis pas baissée pour les ramasser ceux-là !
A part ça, je n'ai rien perdu, un miracle, parce que comme tête en l'air, je me pose là !

O Pedrouzo, l'albergue est un immense gymnase. Il n'ouvre qu'à 16 h. Une file impressionnante de pèlerins en attente d'hébergement. Je pose mon sac et sors le drap en intissé, m'enroule dedans, au soleil et fais une sieste.
Je ne suis pas bien du tout !
Enfin, le gymnase ouvre ! Quand arrive notre tour, plus de place, on fait le forcing et on passe. Les hospitaliers laissent faire, mais ne tamponnent plus.
Je m'octroie une place sur un gradin. Ma voisine est une Parisienne, plusieurs fois rencontrée.
Je lui demande de garder ma place, étends mon sac à puces et file me dégotter un matelas mousse.
Quand je reviens, la police est là. Elle me dit :
- Tu as tout raté ! Il y en a, qui en sont venus aux mains, y a d'l'ambiance !  On rigole un coup.

 

photo4400 personnes, ça fait du bruit.
Les photographes, la presse arrive !
Les journaux titreront :
"Todos los caminos conducen a Santiago"
ou
"Albergues desbordados, 4000 peregrinos pour Compostela !"
Je lève les yeux. Un coup au cœur ! Sur le mur, juste en face, en grosses lettres noires sur fond blanc :

DEPORTATION

Zut, je croyais aller à Santiago !…
Je ne comprends pas, me renseigne, en espagnol, ça veut dire : SALLE DE SPORT ou quelque chose comme ça !
Un tour aux sanitaires. Plus de poignées, des trous dans les portes, deux lavabos, dont un cassé, avec un filet d'eau froide. La misère…
Il est 19 h, je suis si fatiguée que je m'enroule dans ma couverture de survie. Seul, le bout de mon nez dépasse et je me mets en état sophrologique. Le brouhaha dure tard dans la nuit. Il y a des chansons, des sons de guitares, plus ou moins bien accordées. Je suis bercée.
Je n'ai jamais aussi bien dormi ! Je ne sais toujours pas pourquoi !
Un peu comme si toute cette masse de gens m'avait protégée pendant mon sommeil ! Une fourmi au sein d'une fourmilière !

Publié dans Camino Frances 2010

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